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La Méthode Curie Contenu pédagogique

La découverte des rayons uraniques

Le physicien et académicien des sciences Henri Becquerel, inspiré par la découverte des rayons X, s’intéresse à la phosphorescence de l’uranium, un élément chimique connu depuis 1789.

Impression photographique obtenue par Henri Becquerel grâce au minerai d’uranium le 26 février 1896.
En bas de l’image, nous devinons l’impression laissée par une croix de Malte, placée par Becquerel entre les sels d’uranium et la plaque photographique.
Source : Musée Curie (coll. Institut du radium)

Becquerel est parmi ceux qui pensent qu’il pourrait y avoir un lien entre la phosphorescence, et ces étranges rayons invisibles découverts par Wilhelm Röntgen. Dans son laboratoire, situé au Muséum national d’histoire naturelle de Paris, il étudie les images laissées sur des plaques photographiques par des sels d’uranium ayant préalablement été exposés au Soleil. Le scientifique décrit sa démarche dans une note aux Comptes Rendus de l’Académie des sciences1 :

 

Henri Becquerel dans son laboratoire au Muséum d’Histoire Naturelle de Paris, vers 1903.
Henri Becquerel fait partie d’une véritable dynastie de scientifiques qui, depuis trois générations, étudient la luminescence (phosphorescence et fluorescence) de la matière. Depuis des années, Becquerel s’intéresse à l’émission de lumière des sels d’uranium, lorsqu’il découvre, en 1896, les rayons uraniques.
Source : Musée Curie (coll. ACJC)

On enveloppe une plaque photographique Lumière, au gélatino-bromure, avec deux feuilles de papier noir très épais, tel que la plaque ne se voile pas par une exposition au Soleil, durant une journée. On pose sur la feuille de papier, à l’extérieur, une plaque de la substance phosphorescente, et l’on expose le tout au Soleil, pendant plusieurs heures. Lorsqu’on développe ensuite la plaque photographique, on reconnaît que la silhouette de la substance phosphorescente apparaît en noir sur le cliché.2

Un petit accident perturbe la série d’expériences de Becquerel et lui donne l’occasion d’une découverte qui va bouleverser la physique : au mois de février 1896 à Paris, le Soleil n’apparaît pas pendant plusieurs jours consécutifs, rendant impossible ses expériences. Becquerel raconte lui-même cet épisode dans une autre note aux Comptes rendus de l’Académie des sciences :

Parmi les expériences qui précèdent, quelques-unes avaient été préparées le mercredi 26 et le jeudi 27 février et, comme ces jours-là, le Soleil ne s’est montré que d’une manière intermittente, j’avais conservé les expériences toutes préparées et rentré les châssis à l’obscurité dans le tiroir d’un meuble, en laissant en place les lamelles du sel d’uranium. [...] j’ai développé les plaques photographiques le 1er mars, en m’attendant à trouver des images très faibles. Les silhouettes apparurent, au contraire, avec une grande intensité.3

Ainsi Becquerel découvre par hasard que, même sans être exposé au Soleil, et donc même lorsqu’il n’émet pas de lumière par phosphorescence, l’uranium est capable d’impressionner les plaques photographiques. Parmi les images qu’il obtient dans cette nouvelle série d’expériences l’on trouve une célèbre croix de Malte que Becquerel a placé entre la plaque photographique et les sels d’uranium.

Un heureux hasard a voulu que Becquerel développe les plaques photographiques… La curiosité du scientifique ? une intuition ?

Rapidement Becquerel montre que les plaques sont impressionnées par un rayonnement invisible émis par l’uranium à chaque instant, indépendant du phénomène de phosphorescence. Ce rayonnement invisible est similaire par certains points de vue aux rayons X, mais présente une différence remarquable : il est émis par l’uranium spontanément, sans besoin d’aucun apport extérieur d’énergie. Le scientifique appelle ce nouveau phénomène le rayonnement uranique.

 

1L’ensemble des notes publiées par Henri Becquerel aux Comptes rendus de l’Académie des sciences est accessible sur le site de l’Académie des sciences : http://www.academie-sciences.fr/pdf/dossiers/Becquerel/Becquerel_publi.htm

2Henri Becquerel, C.R.A.S. T122 (1896) p. 420-421.

3Henri Becquerel, C.R.A.S. T122 (1896) p. 501-503.

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